Côté sac, ca ne s’arrange pas malgré le litre d’eau en moins. Le tapis de sol que nous avons calé avec les élastiques sur le haut du sac augmentent la prise au vent. Nous sommes sans cesse ballottés. De plus les tapis se prennent dans les buissons le long du chemin trop étroit, créant ainsi une contrainte supplémentaire á notre progression. Par ailleurs, les sentes minces et encombrées ne nous laissent pas facilement manier nos bâtons de marche.
Le chemin suit une ligne de courbe jusqu’à un second col. A la descente, sur l’autre versant de la montagne, nous sommes projetés par le vent, contre la paroi. Nous croisons nos premiers randonneurs nordistes pour qui l’aventure va bientôt s’achever. Ils sont très bronzés : une peau cuivre ! Les premiers paysages que nous offre le GR ne déçoivent pas. On traverse de charmants ruisseaux, on s’élève avec vue sur la cote est de la Corse. Après être arrivés sur un plateau, on décide de faire un sort au hachis Parmentier lyophilisé. Ca fait du bien ! La ballade se poursuit sur des sentiers étroits abrités par des pins entre les fougères. Les panoramas lors des passages aux cols sont toujours surprenants et superbes. Après, environ six heures de marche, on rejoint le refuge de I Paliri.
Le refuge est situé au niveau d’un col abrité par deux barrières de granite rose : c’est splendide ! Un refuge du GR20 c’est quoi ? C’est tout d’abord un point d’eau, mais aussi une construction en pierre pour accueillir les randonneurs qui n’ont pas de tente, une aire de bivouac pour les GRistes qui dorment en tente, un point ravitaillement plus ou moins bien achalandé, une cahute abritant une ou deux douches, une autre cabane pour les WC, le tout plus ou moins bien entretenu et gardé par un gardien plus ou moins aimable.
Arrivés à I Paliri, nous signalons notre présence au gardien du refuge. Au passage, nous achetons une bière Corse, une Pietra qui ne s’avérera pas terrible, mais qui sera, tout de même, facturée 6 €. On rajoute au panier une crème Mont Blanc au chocolat á 2 € et une compote de pomme à boire à 1€. Nous choisissons un emplacement pour notre tente à coté d’un gros rocher et nous empressons de chercher les douches.
Enfin bon, la douche : elle se situe en contre bas du refuge et est directement alimentée par la source d’eau en amont. Entre la source et la cabine, pas de chauffe-eau. La cabine de douche est une « cabane au fond du jardin », mur en pierre, porte en planche de bois vermoulue, bac bétonné moussu, double robinet cassé (on se demande d’ailleurs pourquoi il y a deux robinets sachant que l’eau est á température unique … glaciale). A l’intérieur, il fait nuit noire, un clou dans la porte, trouvé en tâtonnant sert à accrocher ses affaires. L’inhospitalité et la fraicheur des lieux fait qu’on n’y reste pas longtemps. Cependant, le temps d’attente est inversement proportionnel au temps de douche : une cabine pour une centaine de personnes qui arrivent entre 15h et 18h, ca fait un temps d’attente moyen d’une heure par personne. Après 18h avec le vent d’altitude on n’a plus vraiment envie de prendre une douche, car on ne peut plus se réchauffer. L’heure d’attente est propice aux discussions.
On apprend à connaitre nos futurs compagnons de route et on cherche les conseils de ceux qui vont effectuer leur dernière étape le lendemain. Les nordistes jouent les vieux briscards, les sudistes font les éponges en quête d’informations, de bons tuyaux, et surtout, de paroles rassurantes. Cela nous fait, pour le côté sudiste, assis dans les fougères et sur des vieilles souches : un groupe de personnes âgées venues de Savoie « les vieux », un groupe d’une huitaine d’étudiants « les Djeunes », deux-trois couples isolés. Pour la partie nordiste, on a deux Rambos qui nous racontent leurs exploits. Ils sont partis en quasi autonomie. Leurs sacs font 20 kg, ils ont 5kg de nourriture par semaine. Ils ont doublé 3 étapes sur les 15 du GR 20. Ils sont partis au début du mois de juin et ont effectué leur marche sous la pluie, ils ont traversé des névés et ont parfois commencé leur journée sur des brins d’herbes givrés par des gelées matinales. Le GR 20 de l’extrême ! Le temps à partir de la mi-juin se présente bien. On espère aussi que, d’ici notre passage, la neige aura fondu.
Le gardien qui nous annonce le menu nous fait bisquer : ragout de bœuf aux olives sur son lit de pâtes, charcuterie, fromage. On vient de démarrer et on trouve nos sacs très lourds. On préfère se délester. Un réchaud est mis á disposition des randonneurs. On mange notre soupe en compagnie d’un groupe de 6 personnes qui viennent de Castel di Vergio (la 4eme étape en partant du nord): ils sont tout secs, couleur cuivre et contents d’être à la veille de leur dernière étape. Ils fêtent ca en débouchant une bouteille achetée au refuge. Un luxe ! Les gens, sympathiques, nous donneront leur briquet pour allumer le gaz sur nos prochaines étapes. Nous avons trouvé un emplacement à coté d’un rocher en évitant la piste d’atterrissage de l’hélicoptère et la piste de pétanque !?! Des volontaires pour porter des boules ? Nous passons notre première nuit en tente sur le GR 20. A 20h tout le monde est sous la tente à 21h le marchand de sable est passé sur I Paliri.